Le rapport d’activité 2022-2024 de la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) a été publié le 8 avril 2025. Il indique une augmentation du nombre de signalements et expose la réponse de l'Etat face aux dérives sectaire et à l'embrigadement.
Le rapport souligne que la crise sanitaire à la suite de la pandémie Covid-19 a favorisé l'émergence de certains mouvements sectaires en parallèle d'une diffusion de discours complotistes et de rejet de la science. D'autre part, l'utilisation quotidienne des réseaux sociaux par une grande partie de la population française donne à ces phénomènes une scène d'expression élargie et une grande visibilité. Par conséquent, la Miviludes note une hausse de 13,7% des signalements par rapport à 2021, et de 111% par rapport à 2015.
Une hausse des signalements dans les thérapies et soins non conventionnels
Sur l'ensemble des signalements reçus par la Miviludes entre 2022 et 2024, ceux concernant la santé et le bien-être arrivent en tête (37%). Le rapport tire la sonnette d'alarme quant aux signalements liés aux médecines alternatives. De nombreux pseudo-thérapeutes proposent en effet des méthodes de soin présentées comme "miraculeuses" quand bien même celles-ci n'ont pas été approuvées scientifiquement. Si certaines thérapies peuvent être complémentaires avec des soins prodigués par des médecins ; la Miviludes pointe du doigt certaines des pratiques de soins non conventionnelles (PSNC) qui veulent se substituer aux traitements classiques.Le rapport évoque par exemple le cas d'une femme atteinte de troubles psychiatriques qui a totalement arrêté son traitement pour ingérer uniquement des huiles essentielles.
Certains individus ou mouvements profitent en effet de la vulnérabilité de personnes malades ou en situation de handicap. Le rapport souligne la dangerosité de certaines méthodes de dépistage ou de traitement du cancer, comme "l'urinothérapie" qui consiste à boire son urine et qui peut être très dangeureuse. La Miviludes a d'ailleurs signé une convention de partenariat avec la Ligue contre le cancer pour accompagner au mieux les patients et éviter ces dérives. En outre, la Ministre de la Justice avait présenté en aout dernier une circulaire au sujet de ces dérives sectaires dans le secteur du soin et de leur répression par les services de l'Etat.
"Coaching" et emprise sectaire
D'autre part, le rapport évoque les pratiques de "coaching" qui exercent parfois une forme d'emprise sur les individus. Certains thérapeutes se présentent en effet comme des "coachs de vie" prêts à accompagner les individus face aux difficultés de la vie (séparation, dépression, chômage, deuil...). A travers certains rituels (hypnose, magnétisme...) ces "coachs" proposent des solutions à des personnes vulnérables. L'emprise psychologique se transforme alors en gouffre économique, ces individus faisant payer leurs services au prix fort, alors même que ces pratiques ne disposent d'aucune validation. Comme l'indique Etienne Apaire, secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (SG-CIPDR) et Président de la Miviludes : « Leur point commun, c’est qu’ils donnent tous l’impression d’être des psychologues. Sauf qu’ils sont coachs de vie. Aucune institution ne certifie ce genre de pratique très coûteuse ».
Ces coachs ciblent particulièrement les mères de famille séparées, qui se retrouvent dans des situations de fatigue et de fragilité émotionnelle. Cette tendance est jugée inquiétante par le rapport d'activité 2022-2024.
Réponse de l'Etat et renforcement de l'ancrage local
Face à ces tendances inquiétantes, le gouvernement veut intensifier ses mesures. Dans le cadre de la stratégie nationale de lutte contre les dérives sectaires (2024-2027), le gouvernement fixe cette année pour enjeu principal de « déployer, au niveau territorial, des instances départementales dédiées ». Un objectif qui doit se concrétiser par la création de « conseils départementaux dédiés, présidés par les préfets et procureurs, afin de mieux répondre aux besoins locaux et de coordonner les actions de prévention et de répression ». Un point d'honneur a également été porté par Donatien Le Vaillant, le chef de la Miviludes, à la formation des acteurs locaux. Les élus locaux n'ont pas nécessairement les bons réflexes de signalement et d'identification des dérives sectaires. Un « guide de prévention au profit des collectivités locales » devrait sortir prochainement afin que la coopération entre l'échelon local et l'échelon préfectoral puisse être efficace.
Retrouvez le rapport complet ci-dessous :